Le bricoleur de la famille

 

Là où je me précipitais, téléguidé par l'urgence, il prenait son temps, considérait le problème posément.
Là où je me fiais à la solution première évidente, il proposait une autre voie, mettait en valeur un détail apparemment insignifiant qui se révélait primordial et essentiel.
Là où excité par l'achèvement et impatient du résultat, je sautais une étape, il me rappelait la procédure, respectait l'ordre logique de l'opération.
Là où me jugeant trop vite incompétent, je baissais les bras, il faisait fi de l'ignorance et cherchait à comprendre, puisant dans son simple bon sens pour cerner le problème et trouver la solution.

Je le voyais faire. Et je me murmurais en moi- même : mais comment n'y avais-je pas pensé ? Et si l'idée m'avait effleuré comment n'avais-je pas eu l'audace de la mettre en matière ?

L'affaire conclus, la machine réparée, le lino posé, la terrasse terminée, je louais intérieurement cette compétence que j'avais si peu cultivée en formulant un "merci Christian" Mais ce petit mot pouvait-il transcrire la précieuse aide qu'il m'avait apportée ? Comment louer cette alchimie mystérieuse qui permet, non pas de changer le plomb en or, mais l'inachevé, le précaire, le bancal en accompli et solide ou le cassé en état de marche ?

Lui, humble repoussait presque mes remerciements, minimisant la qualité de son aide. Il semblait avoir pris du plaisir à dénouer une situation, à résoudre un problème; et cela semblait le combler sans réellement prendre la mesure du rôle essentiel qu'il avait joué.

Alors quand je lis la définition du Robert - bricolage : réparation faite tant bien que mal, travail d'amateur peu soigné - je me dis que le terme n'est pas adapté pour Christian. La langue française est-elle si pauvre au point de ne pas trouver de mot pour qualifier cette qualité ?

J'ai beau chercher. Je ne trouve pas. Il reste donc à inventer un mot pour cerner cette compétence que tu possèdes, Christian qui se rapprocherait en fait d'un état d'esprit singulier, d'un regard juste.

Pierre, ler décembre 2003