L’aquarelle

 

PEINDRE CE QUE L'ON VOIT, ET NON CE QUE L'ON SAIT

Sur le petit tableau noir de la terrasse du mas La Croix, il y a toujours inscrite cette phrase : "Peindre ce que l'on voit et non ce que l'on sait ".

Se dégager de tout ce que l'on sait : préjugés, schémas parentaux, sociaux ou culturels pour créer ce que l'on est dans notre individualité propre.

Depuis tout petit, à l'école maternelle, on nous a appris que le feuillage d'un arbre était vert et que son tronc était marron, que la mer était bleue.

Quand on s'attache à aiguiser son regard, on s'aperçoit qu'un feuillage peut-être jaune, brun, bleu, même en dehors de l'automne, qu'il peut prendre toutes les nuances de la palette des couleurs. Et un tronc, et la mer de même. En trouvant cette confiance dans ce nouveau regard, on crée une harmonie de couleurs où un arbre mauve, un feuillage jaune, une mer verte ou rose ne choquent pas.

Il en va de même pour les formes. Peindre une maison en oubliant qu'une maison a quatre murs, un toit, des fenêtres et une porte. Ne percevoir que ce que la nature nous laisse à voir : ombres et lumières - pleins et vides - matières et formes. Avancer dans ce nouvel inconnu du connu.

"Peindre ce que l'on voit et non ce que l'on sait ". Cette phrase appelle une autre réflexion, un autre regard sur le monde. Elle peut s'appliquer à chaque activité de notre vie. Dans une conversation, ne plus percevoir notre interlocuteur dans une grille de shémas pré-établis, mais au contraire tenter cette écoute singulière de le percevoir et de l'accepter tel qu'il est en face de nous, l'aimer pour ce qu'il est et non pour ce qu'on croit savoir de lui.

Prendre le risque de tout oublier est un acte d'humilité. Faire fi de tout notre savoir pour se montrer ouvert à autre chose; serait-ce comme une renaissance, un renouvellement de notre personnalité à chaque échange conscient avec le monde qu'il soit personnage, animal, végétal ou minéral.